A l’aube des anniversaires de mes enfants le 30 avril et 1er mai (à quelques heures près ils naissaient le même jour), je ressens le besoin d’écrire de nombreuses pensées qui me traversent depuis un bon moment et que j’avais très envie de partager ici.

Avoir donné la vie à deux reprises est l’une des choses qui continue à me surprendre le plus quand je regarde mon existence en format grand angle. Des enfants, je pensais ne jamais en avoir, je croyais ne jamais en vouloir.

Depuis petite, je me pose (trop) de questions sur le monde et sur l’existence de chacun. J’ai eu la chance de grandir avec une éducation libérale qui m’a permis de trouver mes propres réponses, sans qu’on ne cherche à m’insuffler un mode de pensée unique et réducteur. Cette liberté, je l’ai chérie depuis mon plus jeune âge. Je l’ai cultivée, honorée. Fille unique, j’ai toujours apprécié ce mode de vie et n’ai jamais cessé de développer mon autonomie.

Dans mon futur idéal, la famille ne se dessinait pas comme une finalité absolue. Je disais toujours que je voyais mon destin sur plusieurs plans. Que tout était possible. Sans avoir de but en particulier. Je m’imaginais autant passer ma vie à barouder seule et à œuvrer pour ce qui me tient à cœur, que de rencontrer mon âme sœur et de vivre une vie un peu plus posée.

 

Mais pas trop

Et c’est la raison principale pour laquelle les enfants ne faisaient pas partie de mon scénario. Parce que j’avais peur de cette immense responsabilité. De me sentir envahie par la culpabilité. De ne pas savoir faire. D’être une piètre mère. Et puis ce monde qui me questionne depuis toujours, dans lequel je ne me suis souvent pas sentie à ma place, comment pouvais-je imaginer y voir grandir des âmes qui pourraient en souffrir ?

Je me suis convaincue que je n’étais pas faite pour ça. Que devenir maman ne ferait pas partie de mon parcours.

Il est tellement intéressant de voir à quel point la vie, lorsqu’elle a décidé de nous enseigner quelque chose, nous emmène là où elle veut. Même si cela se situe aux antipodes de nos croyances.

Il a fallu que j’apprenne à m’ouvrir à l’Amour, petit à petit, en enlevant chaque couche de protection dont je m’étais bien recouverte au fil des années, pour survivre et me « blinder » face aux émotions qui ne devaient pas prendre trop de place.

Mais une fois que ce chemin vers l’amour s’entreprend, il n’y a plus de retour en arrière possible.

L’Amour nous submerge, nous envahit, c’est son essence même. Il nous pousse vers notre plus profonde vulnérabilité, pour le meilleur.

 

D’un amour à un autre

J’ai appris à m’aimer chaque jour un peu plus alors que je vivais pour la première fois une relation saine avec celui qui allait devenir mon mari.

D’un amour à un autre, le désir de donner vie au fruit de notre relation est né.

D’un amour à un autre, le mot fraterie s’est matérialisé 5 ans plus tard.

Et ça non plus je ne l’imaginais pas. Après notre fille, on avait dit stop. Parce que la maternité, ce n’est pas seulement ce qu’on voit et ce qu’on croit. C’est dur. Mais vraiment dur. Tellement plus qu’on veut bien le montrer ou en parler. Exprimer toute la complexité de ce que cela représente malheureusement tabou. Et ça, je l’ai très mal vécu.

Au-delà de tout ce que cela apporte de magique et de fantastique, oui c’est vrai, je peux aussi dire que rien ne m’a jamais fait sentir aussi seule, impuissante et désemparée que la maternité. Et je pense pouvoir parler au nom de mon mari en disant que la paternité est un passage tout aussi délicat. Ce nouveau rôle de vie nous a amenés à expérimenter des zones très complexes. C’est certainement ce qu’il y a de plus révélateur, si l’on accepte d’observer et d’explorer ce qui a lieu de l’être en soi.

 

Quel travail…

Alors qu’est-ce qui a fait que 4 ans plus tard, l’envie est revenue et s’est matérialisée si rapidement ? Je n’ai pas LA réponse exacte. Mais comme je le disais plus haut, parfois c’est la vie qui décide, et elle est bien plus déterminée que ce que l’on croit.

Comment expliquer que cette nouvelle présence se laissait ressentir comme si elle faisait déjà partie de nos vies ? Comment signifier que « ça nous pendait au nez » comme on se le disait avec mon mari ? Il n’était même plus question de choix. Il s’agissait de faire la place et laisser la possibilité à cette âme de s’incarner. C’est là que résidait notre unique pouvoir de décision. Ouvrir la voie. Ouvrir la vie. C’est le courant que nous avons suivi.

J’ai adoré accoucher aux deux reprises. Encore plus la deuxième fois car malgré quelques péripéties, j’ai pu réaliser cela physiologiquement, comme je le désirais. Et pour avoir réalisé plein de types de voyages différents durant ma vie, je peux dire que celui-ci est sans contexte le plus grandiose.

 

Une équation à 4

Ça donne quoi quand on n’y connaît rien en fraterie ? C’était l’une de mes appréhensions. Contre toute attente, les pièces se sont emboîtées comme si ce puzzle avait toujours existé.

Je mentirais si je disais que tout est simple et rose tous les jours, je persiste à dire que le rôle de parent est ce qu’il y a de plus difficile. Il m’est arrivé et m’arrive encore de prendre du recul et de me demander si c’est bel et bien moi qui ai fait tout cela. Parce que ça me semble incroyablement merveilleux et en même temps, je trouve cela tellement impliquant.

L’été passé, j’ai vécu une grande période de désarroi et de profonde tristesse qui m’ont beaucoup questionnée et chamboulée. J’en suis allée jusqu’à me demander si cette vie m’appartenait. Le fait de m’en relever m’a renforcée. Une nouvelle porte s’est ouverte, avec encore plus d’amour de l’autre côté.

 

Alors aujourd’hui

7 ans et 2 ans après la naissance de mes enfants, je me demande comment donner à nouveau la vie, parce que je réalise que c’est quelque chose de profondément ancré en moi. J’aime accoucher et je pourrais recommencer encore et encore. Beaucoup ont de la peine à me croire quand je le dis et pourtant, je n’exprime rien qui ne soit pas sincère. C’est aussi une manière de montrer que oui, cette étape peut être magnifiquement vécue malgré, une fois encore, « ce qu’on voit et ce qu’on entend ».

Le désir d’élever un autre enfant est pourtant bel et bien éteint.
Aujourd’hui, ce n’est plus de cela dont j’ai véritablement envie. Il s’agit d’une autre volonté de mettre en vie.

Sous quelle forme, je ne le sais pas encore. Je sais juste que ce processus ne s’arrêtera jamais. Parce que nous sommes faits pour cela, d’une manière ou d’une autre.

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